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Napoléon & Empire

Anne-Jean-Marie-René Savary (1774-1833)

Duc de Rovigo

Blason de Anne-Jean-Marie-René Savary (1774-1833)

Fils de militaire, Anne-Jean-Marie-René Savary vient au monde le 26 avril 1774 à Marcq, dans les Ardennes.

Il entre comme cadet au régiment de Royal-Normandie en 1790, juste à temps pour participer à la répression des troubles de Nancy où la garnison s'est révoltée contre ses officiers nobles. Il passe ensuite à l'armée du Rhin, puis d'Égypte et enfin d'Italie. Il y sert le plus souvent comme officier d'ordonnance, de Jean-Charles Pichegru, de Jean Victor Marie Moreau et finalement de Louis Charles Antoine Desaix.

Après la mort de celui-ci à Marengo (14 juin 1800), il en porte la nouvelle à Napoléon Bonaparte. Nommé aide de camp du Premier consul, il gagne sa confiance et son affection par son obéissance absolue et se voit bientôt chargé de missions délicates : enquête sur l'enlèvement du sénateur Clément de Ris (dont Honoré de Balzac s'inspirera pour son roman Une ténébreuse affaire), surveillance des chouans.

Ces services lui valent d'être promu colonel. Il prend alors le commandement d'une légion de gendarmerie d'élite spécialement destinée à la garde du Premier consul. Il reçoit conjointement celui d'une contre-police militaire affectée au contrôle et à la surveillance de toutes les autres. D'où de fréquents démêlés avec Joseph Fouché et Bon-Adrien Jannot de Moncey.

René Savary épouse le 27 février 1802 Marie Charlotte Félicité de Faudoas Barbazan de Segnanville, cousine des Polignac, qui lui donnera sept enfants.

Général de brigade depuis le 29 août 1803, il participe à l'exécution du duc d'Enghien, le 21 mars 1804. C'est lui qui est chargé de l'application matérielle du verdict de mort rendu par la Commission militaire.

Général de division en 1805, il retrouve les champs de bataille et s'y montre aussi courageux que valeureux. Il renseigne l'Empereur sur les dispositions ennemies avant Austerlitz (2 décembre), s'empare de la forteresse de Hamelin (20 novembre 1806), remporte une brillante victoire sur les Russes à Ostrolenka (16 février 1807), charge glorieusement à Friedland (14 juin).

Une fois la paix signée à Tilsitt (8 juillet 1807), Savary est envoyé à Saint-Petersbourg surveiller l'exécution des clauses secrètes du traité. Il se révèle médiocre diplomate, peu aidé d'ailleurs par sa réputation de bourreau de Vincennes qui lui ferme toutes les portes.

Il rentre en France en janvier 1808, est nommé duc de Rovigo et est envoyé en Espagne en mars. Cette fois sa mission est de convaincre les souverains espagnols de le suivre à Bayonne. Il s'en acquitte à la perfection puis retourne à Madrid où il devient, en remplacement de Joachim Murat, malade, et en attendant l'arrivée de Joseph Bonaparte, le maître du pays. Il le quitte à l'arrivée du nouveau roi.

Sa faveur continue d'augmenter tandis que celle de Fouché décline. Il est désormais, avec Hugues-Bernard Maret, un des intimes confidents de l'Empereur, qu'il suit partout. Si bien que le 3 juin 1810, Napoléon Ier finit par faire de lui son nouveau ministre de la Police. Sa nomination inquiète car chacun sent bien que le nouveau titulaire du ministère se montrera intraitable, à la différence de son prédécesseur, même pour ceux qui disposent d'argent ou de relations.

Après des difficultés initiales, accrues par la mauvaise volonté de Fouché qui l'oblige à recréer de toutes pièces ses services d'espionnage, Savary se lance à la chasse aux opposants. Madame de Staël, Madame Récamier ou la duchesse de Chevreuse en font les frais, tout comme de hauts prélats qui se retrouvent enfermés au donjon de Vincennes. Les arrestations se multiplient. L'air de Paris devient irrespirable.

Pourtant, en 1812, Savary s'avère incapable de réagir au coup d'État du général Claude-François de Malet (23 octobre) et se laisse arrêter et conduire en prison par les conjurés, sans opposer de résistance. Bien que ridiculisé par cet épisode, il conserve la confiance de l'Empereur.

Il la justifie en 1814 en étant parmi les rares collaborateurs de Napoléon Ier à lui rester fidèle jusqu'au bout. Après l'abdication, il n'effectue nulle démarche auprès des Bourbons et vit retiré à la campagne durant toute la première Restauration.

Durant les Cent jours, il se hâte de proposer ses services et devient inspecteur général de la gendarmerie, ce qui lui donne la direction de la police secrète de l'Empereur.

Loyal jusqu'au bout, il tente de suivre Napoléon Ier à Sainte-Hélène mais est arrêté par les Anglais sur le HMS Bellerophon et interné à Malte. Il s'évade au bout de sept mois et se fait homme d'affaires à Smyrne car, porté sur la liste de proscription du 24 juillet 1815 et condamné à mort par contumace depuis décembre 1816, il ne peut rentrer en France. Il finit cependant par le faire après l'amnistie partielle de 1819. Traduit en conseil de guerre, il est acquitté et rétabli dans ses dignités mais reste inemployé jusqu'à la Révolution de juillet.

Louis-Philippe Ier lui donne le commandement en chef des troupes d'occupation en Algérie. Résolu à pacifier le pays, il n'hésite pas devant les procédés les plus violents : le massacre de la tribu des El Ouffias le 7 avril 1832, par exemple. Malade, il quitte ses fonctions en avril 1833 et meurt deux mois plus tard.

La ‒ modeste ‒ tombe du duc de Rovigo  Tombe d'Anne-Jean-Marie-René Savary se trouve au cimetière parisien du Père Lachaise, division 35.

"Anne-Jean-Marie-René Savary, duc de Rovigo" par Robert Jacques François Faust Lefèvre (Bayeux 1755 - Paris 1830).

"Anne-Jean-Marie-René Savary, duc de Rovigo" par Robert Jacques François Faust Lefèvre (Bayeux 1755 - Paris 1830).

Savary semble avoir eu un certain goût pour les déguisements, trait incongru chez un personnage aussi dépourvu de fantaisie. Il y eut recours deux fois au moins dans sa carrière : lorsqu'il espionnait les chouans sous le Consulat, lorsqu'il dut quitter l'Espagne soulevée en 1808.

Le nom de Savary est inscrit sur la 14e colonne (pilier Est) de l'arc de triomphe de l'Etoile.  Arc de triomphe de l'Etoile à Paris

Les Mémoires du duc de Rovigo en huit volumes, publiés en 1828, font partie des témoignages fiables sur le Consulat et le Premier Empire, même si leur auteur, naturellement, vise à justifier ses actions dans les affaires auxquelles il participa : enlèvement et exécution du duc d'Enghien, mort de Pichegru, affaire Malet en particulier.

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Anne-Jean-Marie-René Savary (1774-1833)
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"Anne-Jean-Marie-René Savary, duc de Rovigo". Gravure du XIXème siècle
Anne-Jean-Marie-René Savary (1774-1833)
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"Le général Savary". Gravure du XIXème siècle