N & E
Napoléon & Empire

Biographie de Napoléon Bonaparte
6. Le déclin de l'Empire

Le désastre de la campagne de Russie

Durant toute l'année 1812, Napoléon 1er se soucie essentiellement de la préparation puis de l'exécution de la Campagne de Russie. Il doit cependant, au printemps, prendre des mesures pour tenter de conjurer la disette qui sévit dans plusieurs départements, ce qui le conduit à faire adopter une loi sur les grains le 4 mai et à taxer le prix du blé le 8.

Mais ces préoccupations intérieures, pas plus que ses démêlés avec le Pape Pie VII (rupture du Concordat de 1801 le 23 février, décision de transférer le Saint-Père à Fontainebleau le 21 mai), ou que les nouvelles mitigées qui lui arrivent d'Espagne, faisant état des succès inquiétants enregistrés par Wellington, ne peuvent distraire longtemps son attention des affaires russes.

En janvier, l'Empereur ordonne à Louis-Nicolas Davout d'occuper la Poméranie suédoise, ce qui détermine Jean-Baptiste Jules Bernadotte à proposer peu après l'alliance suédoise au Tsar Alexandre Ier. En février, Napoléon oblige le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III à lui promettre un contingent de vingt mille hommes pour la future campagne. En mars, les troupes françaises entrent en Prusse et l'Autriche à son tour est taxée : d'elle, ce sont trente mille hommes qui sont exigés. A la réaction du Tsar, qui est de faire parvenir à son ambassadeur à Paris un ultimatum à destination du gouvernement français et d'accepter l'alliance offerte par Bernadotte, Napoléon Ier réplique en mettant sur le pied de guerre les corps d'armée stationnés en Allemagne.

Après la présentation de l'ultimatum du Tsar à Napoléon, celui-ci quitte Paris le 5 mai et rejoint la Grande Armée stationnée à Königsberg Les bords du Pregel à Königsberg [Kaliningrad] le 12 juin.

Le 24, l'Empereur franchit le Niémen, après avoir refusé de reconstituer le royaume de Pologne et ordonné de dissoudre la diète polonaise de Varsovie, qui réclamait cette reconstitution. Le 28, Napoléon entre à Wilno (ou Vilna [l'actuelle Vilnius] et s'y attarde dix-huit jours, ce qui, selon Antoine de Jomini, constitue la plus grande erreur qu'il ait commise de toute sa vie. L'armée se remet donc en marche le 16 juillet et l'Empereur entre à Vitebsk le 28, affirmant à Murat que : la première campagne de Russie est terminée. 1813 nous verra à Moscou, 1814 à Saint-Pétersbourg. La guerre de Russie est une guerre de trois ans.

Après un nouvel arrêt de quinze jours, Napoléon se remet pourtant en marche le 13 août en direction de Smolensk, passe le Dniepr et entre le 18 dans la ville évacuée la veille par les Russes. L'étape suivante le mène à Wiazma, où il pénètre le 29, le jour de la nomination de Mikhaïl Illarionovitch Golenichtchev-Koutouzov comme commandant en chef des troupes russes. Trois jours plus tard, Napoléon écrit à Marie-Louise : Voilà dix-neuf ans que je fais la guerre et j'ai donné bien des batailles et fait bien des sièges en Europe, en Asie, en Afrique. Je vais me dépêcher de finir celle-ci pour te revoir bientôt.

Il croit en avoir l'occasion le 7 septembre, lorsque les Russes acceptent enfin une confrontation générale : c'est la bataille de la Moskova (ou Moskowa) [connue hors de France sous le nom de Bataille de Borodino], pour laquelle l'Empereur a galvanisé ses troupes en exposant le portrait du roi de Rome peint par Gérard devant sa tente. L'engagement, excessivement meurtrier, n'est pas décisif.

Les Russes évacuent cependant Moscou mais n'abandonnent à Napoléon qu'une ville déserte et incendiée où il entre le 14 septembre. Déçu dans son attente de recevoir du Tsar des offres de paix, il se décide à faire lui-même des propositions confidentielles qui restent sans effet.

Il lui faut donc maintenant envisager la retraite. Dès le 5 octobre, il commence à prendre des dispositions en ce sens mais s'attarde pourtant dans la capitale russe pendant quinze jours encore malgré les premières chutes de neige, prenant le temps de réorganiser la Comédie-Française par le décret de Moscou daté du 15. Le 19, enfin, il donne le signal du départ.

La retraite, qui se fait sur la route dévastée à l'aller, tourne vite au cauchemar. Dès le 25 octobre, Napoléon lui-même manque d'être enlevé par un parti de cosaques. Le 31, l'Empereur arrive à Wiazma. Le 9 novembre, peu après avoir reçu la nouvelle de la conspiration du général Malet, il est à Smolensk. Lorsqu'il quitte la ville, le 14, la température est de -25°C.

Les jours suivants, il dirige une série d'engagements connus aujourd'hui sous le nom de bataille de Krasnoïe, qui voit le maréchal Michel Ney, commandant de l'arrière-garde, se couvrir de gloire malgré la perte de la plupart de ses hommes. La bataille, victoire ou défaite, permet au moins à l'Empereur de franchir le Dniepr et d'atteindre la ville d'Orscha, où il se charge personnellement de brûler ce qu'il veut éviter de voir tomber aux mains des Russes.

Quelques jours plus tard, face à la Bérézina, ce sont les aigles de tous les corps qu'il fait brûler, ainsi que les fourgons et les voitures qui suivent encore l'armée. Le 27, Napoléon et sa garde passent le fleuve sur les ponts construits par Jean-Baptiste Eblé et ses pontonniers.

Le 5 décembre, après avoir confié l'armée à Joachim Murat, l'Empereur part pour Varsovie en compagnie d'Armand de Caulaincourt. Il y arrive le 10 et repart immédiatement. Le 18, peu avant minuit, il est aux Tuileries.

Durant les derniers jours de l'année, il tente, par son attitude et ses activités (audiences, chasses, visite du Salon du Louvre), de combattre la calamiteuse impression laissée par la publication dans le Moniteur de la nouvelle du désastre militaire de la Campagne de Russie.

Campagne de Saxe. Evacuation de l'Allemagne

Dès les premiers jours de 1813, Napoléon 1er entreprend de se préparer aux conséquences de la campagne de Russie. Le 11 janvier, il obtient du Sénat 350 000 hommes. Quelques jours plus tard, il organise puis met en place un conseil de régence : Marie-Louise devient régente avec Cambacérès comme conseiller secret.

Tout en anticipant ainsi la reprise des hostilités, l'Empereur joue également la carte diplomatique. A l'Autriche, qui se pose en médiatrice dans le conflit franco-russe, il offre de restituer l'Illyrie. Du Pape Pie VII, il obtient, le 25 janvier, à Fontainebleau, la signature d'un nouveau concordat.

Mais ces efforts ne sont pas fructueux et les succès mêmes ne sont que provisoires : moins de deux mois après l'avoir signé, le Saint-Père dénonce le concordat ; l'Autriche, le 7 avril, rejette les propositions françaises. L'offensive russo-prussienne (la Prusse a déclaré la guerre à la France le 17 mars) ayant entre temps atteint Hambourg et Dresde, Napoléon, après avoir obtenu 180 000 hommes supplémentaires du Sénat, part pour l'armée le 15 avril. Le 25, il est à Erfurt et prend le commandement des troupes.

Bien qu'endeuillée par les morts du maréchal Bessières et du grand-maréchal du Palais Duroc, la première partie de la campagne est favorable aux armes françaises. Les batailles de Lützen (2 mai) et Bautzen (20-21 mai) sont des succès, que Napoléon ne peut complètement exploiter, faute de cavalerie ; Dresde et Hambourg sont reprises.

Le 4 juin l'Empereur accepte pourtant de signer l'armistice de Pleiswitz, commettant ainsi, selon Antoine-Henri de Jomini, sa plus grande erreur pendant sa carrière de général en chef. Napoléon 1er espère sans doute, à l'occasion des pourparlers qui vont s'engager, éviter l'entrée en guerre de l'Autriche, encore officiellement neutre. Il escompte par ailleurs reconstituer la cavalerie qui lui fait défaut. Il est possible enfin qu'il cherche à montrer à l'opinion publique française, de plus en plus hostile au régime, qu'il ne porte pas la responsabilité du conflit.

Quoi qu'il en soit, ce sont les coalisés qui tirent le plus grand profit de la suspension d'armes. Entre ses deux rencontres avec Napoléon, à Dresde, les 26 et 30 juin, Metternich, qui se pose en médiateur, s'est entendu avec le Tsar Alexandre Ier. Les pourparlers auxquels Napoléon a consenti, qui prennent le nom de congrès de Prague, n'ont d'autre but que de donner le temps à Karl Philipp de Schwartzenberg de rassembler et d'organiser les forces autrichiennes. Quand Napoléon accepte la plus grande part des conditions, pourtant très dures, qui lui sont proposées, Metternich en ajoute d'autres, irrecevables.

Le 10 août 1813 à minuit, le chancelier autrichien clôture le congrès. Deux jours plus tard, l'Autriche, financée par l'Angleterre, tout comme le sont la Russie et la Prusse, déclare la guerre à Napoléon.

Les 26 et 27 août, à Dresde, l'Empereur remporte sa dernière grande victoire en Allemagne. Mais il voit, autour de lui, ses maréchaux et généraux subir défaites sur défaites (Oudinot, Vandamme, Ney), son frère Jérôme fuir sa capitale de Cassel devant un raid de cosaques et ses alliés le trahir. La Bavière fait défection le 8 octobre. Pire, l'armée saxonne retourne ses armes au plus fort de la bataille de Leipzig et achève dans les rangs coalisés un combat qu'elle a entamé sous le drapeau impérial.

Défait, Napoléon entame une retraite qui le conduit le 23 octobre à Erfurt (où Joachim Murat le quitte pour rejoindre Naples), le 30 à Hanau, où il bat les Bavarois, le 2 novembre à Francfort-sur-le-Main, avant de passer le Rhin. Le 9, il est de retour à Paris.

Derniers efforts de paix. Campagne de France

Une semaine plus tard, il propose aux coalisés, qui touchent aux frontières de la France, un congrès pour discuter de la paix. Les alliés réagissent par une déclaration, dite de Francfort, affirmant qu'ils ne font pas la guerre à la France, mais à Napoléon. Puis ils franchissent à leur tour le Rhin (2 décembre).

L'Empereur, après avoir fait examiner les autres propositions contenues dans la déclaration de Francfort par le Corps Législatif, envoie vingt-trois sénateurs et conseillers d'État dans les divisions militaires pour accélérer la conscription (la classe 1815 vient d'être appelée par anticipation) et l'organisation des gardes nationales.

Dans la situation désespérée où il se trouve – les Anglais sont dans le Sud-Ouest et en Toscane, les Autrichiens en Alsace et en Suisse, les Russes en Hollande ; il vient d'avoir à reconnaître le titre de roi d'Espagne à Ferdinand VII par le traité de Valençay ; Metternich ne fait à ses propositions que des réponses dilatoires – Napoléon 1er doit encore subir la révolte, tardive, du Corps législatif qui, le 29 décembre, condamne l'activité ambitieuse de l'Empereur.

Celui-ci clôt donc le registre de ses actes publics de l'année 1813 en ajournant cette assemblée.

La colère de l'Empereur contre les députés continue de s'exhaler le 1er janvier 1814, à l'occasion de la réception du jour de l'an : il apostrophe durement les parlementaires présents et les invite à retourner dans leurs départements. Dans les jours qui suivent, il déploie une activité intense pour se préparer à repousser l'invasion. Au cours du mois de janvier, il crée des corps francs à Paris, met en activité la garde nationale de la capitale et présente le roi de Rome à ses officiers, envoie Armand de Caulaincourt négocier avec les coalisés, rappelle en France Eugène de Beauharnais et ses troupes, ordonne de ramener le Pape Pie VII en Italie, nomme son frère Joseph lieutenant général de l'Empereur et part finalement rejoindre l'armée, le 25. Il ne reverra jamais ni sa femme ni son fils Napoléon II, Roi de Rome, miniature de J.B. Isabey.

Chaussant, comme il le dira lui-même, les bottes du général de l'armée d'Italie, il ne perd pas un instant pour engager la lutte. Le 27 janvier 1814, il bat l'avant-garde de Blücher à Saint-Dizier. Deux jours plus tard, à la tête des « Marie-Louise », tout jeunes soldats encore inexpérimentés, il récidive à Brienne.

Ces succès, quoi que ternis par l'échec subi le 1er février à La Rothière, face aux forces austro-prussiennes réunies, lui permettent d'obtenir l'ouverture d'une conférence franco-alliée, le 3, à Châtillon-sur-Seine. Les conditions qu'on lui propose – retour de la France à ses limites antérieures à la Révolution – sont telles qu'il les refuse et que la conférence est suspendue dès le 7.

Après avoir dû faire retraite sur Nogent, et avoir envisagé l'évacuation de Paris par le gouvernement, Napoléon obtient du 10 au 19 février une série de victoires sur les armées Prussiennes, Autrichiennes et Russes (Champaubert, Montmirail, Château-Thierry, Vauchamps, Mormant, Nangis, Montereau) qui entraîne la reprise de la conférence de Châtillon sans interrompre les hostilités.

A nouveau, Napoléon 1er rejette les propositions qui lui sont faites mais propose à son beau-père l'empereur François 1er la paix sur les bases de la déclaration de Francfort (4 décembre 1813). Une nouvelle victoire sur Blücher, le 22 février, amène les alliés à se réunir à Troyes pour tenir un conseil de guerre qui décide de la retraite et offre à Napoléon une suspension d'armes.

Fin février, parallèlement aux discussions de Châtillon, des négociations sont donc menées à Lusigny en vue d'un armistice. Leur échec amène Napoléon 1er à prendre deux décrets par lesquels il appelle tous les Français à mener contre l'ennemi une guerre de partisans et à s'insurger contre les autorités qui tenteraient de les en détourner. Le 7 mars 1814, L'Empereur est à nouveau victorieux à Craonne mais sans pouvoir couper aux Alliés la route de Paris. De nouvelles batailles restent nécessaires. Les 9 et 10, à Laon, Napoléon échoue encore à obtenir un avantage décisif et doit se replier sur Soissons.

Le 13 mars, dernier succès, il reprend Reims mais le 20, lendemain du jour où se sont définitivement interrompues les négociations de Châtillon, il subit à Arcis-sur-Aube un échec qui l'oblige à se retirer derrière l'Aube et à laisser les Alliés marcher sur Paris. Il conçoit alors le plan de couper les lignes de ravitaillement des Alliés et se dirige sur Saint-Dizier. Mais l'interception de sa correspondance, en révélant à l'ennemi l'existence d'un fort parti royaliste dans la capitale, convainc les stratèges étrangers de continuer leur offensive.

L'Empereur est à Fontainebleau, le 31 mars 1814, quand tombe Paris.

Première abdication. Exil

Napoléon est presque aussitôt, le 2 avril, déclaré déchu de son trône par un Sénat qui vient d'investir un gouvernement provisoire dominé par Talleyrand. Le Corps Législatif ayant voté la même résolution le 3, Napoléon Ier signe le 4, à Fontainebleau, une formule d'abdication conditionnelle, qui préserve les droits de son fils et de l'Impératrice régente. Mais après une entrevue avec ses maréchaux, le 6 avril, il renonce pour lui et sa famille aux trônes de France et d'Italie, comme l'exigent les souverains étrangers.

Après avoir oscillé pendant quelques jours entre découragement et velléités de revenir sur son abdication, Napoléon finit par céder au désespoir et le 12 avril, au témoignage de Caulaincourt, tente de se suicider par empoisonnement. Y ayant échoué, il se résigne le lendemain à accepter l'offre qu'on lui fait de la souveraineté de l'île d'Elbe L'île d'Elbe (L'île de Sancho Pança donnée à César, dira l'historien Henry Houssaye). Le 20 avril, il fait ses adieux à sa garde Les adieux de Napoléon à la garde impériale, le 20 avril 1814, par H. Vernet dans la cour du Cheval-Blanc du château de Fontainebleau et part en compagnie de Bertrand, Drouot, Cambronne et de six cents hommes.

Napoléon embarque le 28 avril à Saint-Raphaël, sur la frégate anglaise The Undaunted, après avoir soulevé sur son passage, en Provence, de vives manifestations d'hostilité. Le 4 mai 1814, il pose le pied dans son nouveau "royaume" La baie de Portoferraio sur l'île d'Elbe. Sa soeur Pauline, Madame Mère, Maria Walewska et le petit Alexandre Walewski, fils de celle-ci, l'y rejoignent bientôt, mais pas Marie-Louise, qui se console de l'exil de son impérial mari dans les bras du général autrichien Adam Albert von Neipperg.

Souverain de l'île d'Elbe. Evasion. Le vol de l'Aigle

Sur le théâtre miniature qu'on lui a imposé, Napoléon déploie néanmoins toute l'activité dont il est capable, réalisant en quelques mois un prodigieux travail de réorganisation. L'ex-arbitre de la politique européenne semble avoir accepté le sort qui lui est fait. Il ne s'en tient pas moins au courant des évolutions de la situation politique en France.

Début 1815, à toutes les bonnes raisons que Napoléon possède déjà de sortir de son île par une héroïque aventure –  l'ennui, la crainte de l'assassinat, les difficultés financières dues au non-versement de la dotation promise, les bruits sinistres de déportation qui filtrent de Vienne – vient s'ajouter la connaissance positive du mécontentement croissant que suscitent les Bourbons. Vers la mi-février, Hugues Bernard Maret envoie à l'Empereur un émissaire pour lui conseiller de hâter son retour, afin de profiter de l'impopularité d'un régime qui multiplie les mesures vexatoires à l'égard des républicains et des bonapartistes. Napoléon, alors, se décide et passe à l'acte.

Le 25 février, trois proclamations, datées du 1er mars et adressées au peuple français, à l'armée et à la garde, sont imprimées sur l'île d'Elbe. Le lendemain, à neuf heures du soir, c'est l'appareillage. Napoléon est à bord du brick L'Inconstant, qu'accompagne une flottille de quatre trois-mâts et deux felouques. Sept-cents hommes et quatre pièces de canons composent son armée.

Après une traversée sans encombre, le débarquement a lieu le 1er mars à Golfe-Juan Plage de Golfe-Juan, entre Cannes et Antibes. Lecture est aussitôt donnée de la proclamation destinée à l'armée, dans laquelle Napoléon affirme que l'Aigle, avec les couleurs nationales, volera de clocher en clocher jusqu'aux tours de Notre-Dame.

Napoléon choisit de rallier Lyon par les Alpes, pour éviter les villes royalistes de la vallée du Rhône. Le 4 mars 1815, il est à Digne, le 5 à Sisteron puis à Gap. Le 7, alors que l'ordonnace royale ordonnant de lui courir sus et de le fusiller sur simple constatation de son identité date de la veille, il obtient, à Laffrey, les premiers ralliements de troupes. En soirée, il fait son entrée à Grenoble. A Lyon, le 10, la population lui fait un triomphe, ainsi qu'aux 7 000 hommes qui déjà l'accompagnent. Le lendemain, il prend ses premiers décrets, rétablissant le drapeau tricolore, renvoyant les Chambres et ordonnant aux émigrés rentrés après le 1er janvier 1814 de sortir immédiatement de l'Empire.

Il poursuit ensuite sa marche sur Paris par Mâcon, Chalon-sur-Saône et Dijon. Le 18 mars, Michel Ney, qui avait pourtant promis de le ramener au roi dans une cage de fer, rejoint Napoléon à Auxerre et se rallie. Enfin, le 20 mars 1815, Napoléon 1er entre triomphalement à Paris, le jour anniversaire de la naissance du Roi de Rome. Le soir-même, il constitue son gouvernement. Le prodige de l'invasion d'un seul homme, comme l'écrira Chateaubriand, s'est accompli.

Les Cent-jours. Waterloo. Seconde abdication

Dans les jours qui suivent son installation à Paris, l'Empereur prend une série de mesures emblématiques qui semblent destinées à rappeler les origines républicaines de son régime : suppression de la censure, réactualisation des lois révolutionnaires contre les Bourbons, prise de commandement de la garde nationale de Paris par l'Empereur en personne. Bientôt, Benjamin Constant, à qui Napoléon Ier a commandé une Constitution le 14 avril, bâcle en quelques jours un Acte additionnel aux constitutions de l'Empire que l'Empereur promulgue le 22 (mais la proclamation officielle, après référendum, n'a lieu que le 1er juin lors de la cérémonie du Champ de mai) et qui ne satisfait personne.

On l'applique cependant aussitôt, et le mois de mai, qui voit par ailleurs la réconciliation de Napoléon et de son frère Lucien, est surtout dominé par les élections. Soigneusement mitonnées par Joseph Fouché qui prévoit déjà le dénouement de l'aventure et prépare la suite, elles amènent à la Chambre une large majorité libérale (500 élus), 80 bonapartistes et une quarantaine de républicains. Napoléon, qui n'est pas la dupe de son ministre, lui déclare un jour : Vous êtes un traître, Fouché, je devrais vous faire pendre. Mais l'autre se contente de répondre Je ne suis pas de l'avis de votre Majesté et de continuer sa besogne.

Napoléon laisse faire car sa grande préoccupation, c'est la guerre. Depuis le début, elle menace. Le 29 mars 1815, malgré les conseils de son beau-frère, Joachim Murat déclenche les hostilités contre l'Autriche en Italie. Napoléon tente bien, le 4 avril, d'écrire aux souverains européens pour faire savoir qu'il accepte le traité de Paris du 30 mai 1814 mais ceux-ci ont déjà déclaré que Napoléon Bonaparte s'est placé hors des relations civiles et sociales et comme ennemi et perturbateur du monde, il s'est livré à la vindicte publique. Leur intransigeance est totale. Le 25 avril, ils prennent l'engagement de ne pas déposer les armes avant d'avoir abattu Napoléon. Il ne reste plus à l'Empereur qu'à mettre sur pied une armée.

Le 12 juin 1815, huit jours après la distribution des aigles dans la grande galerie du Louvre, Napoléon quitte Paris pour rejoindre l'armée du Nord. En partant, il dit à la femme du général Bertrand ces quelques mots, qui ne trahissent pas une bien grande confiance  : Eh bien, Madame Bertrand, pourvu que nous ne regrettions pas l'île d'Elbe. Il n'en adresse pas moins, le 14 juin, une nouvelle proclamation à ses troupes, à la tête desquelles il franchit la Sambre le lendemain.

La campagne de Belgique débute par une victoire sur les Prussiens à Gilly, près de Charleroi. Le 16 juin, à Ligny, dans la plaine de Fleurus, Napoléon fait subir à l'ennemi des pertes sévères sans cependant parvenir à l'anéantir tandis que Michel Ney échoue devant Arthur Wellesley de Wellington, à la bataille des Quatre-Bras La ferme des Quatre Bras en 2015. Mais le 18, la désastreuse bataille de Mont-Saint-Jean, dite de Waterloo Le champ de bataille de Waterloo met un terme à la campagne de Belgique.

De retour à l'Élysée le 21 juin, Napoléon se heurte à l'hostilité des chambres parlementaires et n'ose rééditer le coup d'État de Brumaire, comme le lui conseillent son frère Lucien et le maréchal Davout, au risque d'allumer la guerre civile. Le 22, il abdique en faveur de son fils mais Joseph Fouché forme un gouvernement provisoire, prend la direction des affaires et élude la proclamation de Napoléon II.

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 Photo de Lionel A. Bouchon Photos par Lionel A. Bouchon.
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